Cérémonie du 28 janvier 2024

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80eme-Liberation_logoCérémonie du dimanche 28 janvier 2024

80ème anniversaire de l’assassinat de François Verdier en forêt de Bouconne

 

Verdier F - Matt2 Street Art 2024

Quelle est la raison d’être d’une commémoration comme celle qui a lieu ce 28 janvier 2024 ? D’aucuns doutent de l’utilité de telles cérémonies. Ce n’est pas mon cas parce que je fais miens ces mots de Vladimir Jankélévitch : « Si nous cessions d’y penser, ils seraient définitivement anéantis et nous achèverions de les exterminer. Les morts dépendent entièrement de notre fidélité. »

Laurent Douzou

IMG_5071IMG_5108Le drapeau de Libération-Sud remis à deux collégiens volontaires la cérémonie est ouverte.

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Vidéo du discours d’accueil par la présidente du Mémorial François Verdier Forain Libération-Sud

 

Cette année, ce sont les élèves du collège Jean-Pierre Vernant qui ont rendu hommage à François Verdier. Après le mot d’accueil de leur principal, M. Franck Lemaire, les collégiens ont interprété des extraits d’une pièce de théâtre créée par leurs enseignants. Ils ont ensuite rendu hommage à Jean-Pierre Vernant par un chant qu’il affectionnait particulièrement « le temps des cerises ».

Vidéo de l’hommage des collégiens de Jean-Pierre Vernant

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Discours de Laurent Douzou, historien de la Résistance

Vidéo de l’allocution de Laurent Douzou

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Mesdames, Messieurs, en vos titres et qualités,

Chers amis de la Résistance,

Chers élèves et chers collègues du collège Jean-Pierre Vernant,

C’est un honneur d’être convié par l’Association du Mémorial François Verdier Forain Libération-Sud à prendre la parole en ce 80ème anniversaire de son assassinat. Nous perpétuons une tradition inaugurée dès le 4 février 1945 alors que Jeanne Verdier était encore au camp de Ravensbrück où elle était arrivée 4 jours après l’assassinat de son mari. Cette longévité dans la fidélité, ce n’est pas rien ! Longtemps, ce sont des acteurs de la lutte clandestine qui ont pris la parole. Le temps faisant son œuvre, les historiens ont pris le relais. Toutefois, beaucoup de celles et de ceux qui sont ici présents aujourd’hui n’ont nul besoin que je retrace l’itinéraire de François Verdier, Forain dans la Résistance. Vous êtes ici précisément parce que vous savez qui était cet homme. Je conseille en tout cas vivement la lecture du beau livre d’Elérika Leroy qui restitue François Verdier, l’honnête homme, le résistant, l’unificateur.

Comment parler de lui en janvier 2024 si loin de janvier 1944 ? Peut-être d’abord en relevant que notre époque incertaine a été précédée de temps bien plus rudes dans lesquels nos devanciers se sont montrés capables de surmonter des situations qui semblaient désespérées. Ensuite, en restituant à François Verdier sa pleine dimension humaine qui souligne ce que son comportement eut d’héroïque.

Né avec le siècle en Ariège dans une famille modeste, François Verdier avait connu jusqu’en 1940 une existence pleine et réussie. Entrepreneur prospère, membre de la SFIO et de la Loge « Les Cœurs Réunis » à l’Orient de Toulouse, secrétaire fédéral de la Ligue des droits de l’homme, il était père de deux enfants, Jacques et Françoise. Ce juge au tribunal de commerce présentait tous les attributs d’un notable en vue dans le paysage toulousain. Il avait beaucoup à perdre – alors qu’il était jeune encore – s’il prenait le parti de « faire quelque chose » comme on disait dans les premiers temps de ce que nous appelons la Résistance.

Or, François Verdier s’est lancé immédiatement dans la lutte. Il a été des noyaux d’une résistance balbutiante qui ont vu le jour très tôt alors même que la popularité de Pétain était forte pour ne rien dire du fait que la police, la justice et l’information étaient à sa botte. Il fallait alors du courage et des valeurs chevillées au corps pour désobéir au nouveau régime. À Toulouse, où de solides noyaux antifascistes soudés par l’aide à la République espagnole avant-guerre coexistaient avec des réfugiés et des étrangers désireux d’agir, la lutte clandestine s’organisa progressivement.

François Verdier, quant à lui, gravita dans la nébuleuse de deux groupes dont la dénomination en dit long sur les valeurs de leurs membres : Vérité d’une part, Liberté, Égalité, Fraternité d’autre part.

Avec une poignée d’autres comme Achille Teste ou Armand Ducap (dont je cite les noms parce qu’ils ont pris la parole ici même), François Verdier s’est évertué à créer de toutes pièces la possibilité d’une action contre un État autoritaire qui foulait aux pieds les valeurs de la République.

Fin 1941-début 1942, la rencontre avec le mouvement Libération qui commençait à essaimer en zone sud fut décisive. Liberté, Égalité, Fraternité diffusait déjà la feuille clandestine Libération dont les accents nettement républicains lui avaient tout de suite plu. Se fondre dans Libération, c’était le moyen pour le groupe toulousain d’élargir son action en bénéficiant d’un soutien de poids.

Le colonel Bonneau fut jusqu’en novembre 1942 le chef de cette région baptisée « Rose » par Libération. Pierre Hervé le remplaça avant de regagner Lyon en avril 1943 pour devenir secrétaire général des Mouvements Unis de Résistance, les M.U.R. Les trois principaux mouvements de résistance non communiste de zone sud (Combat, Franc-Tireur et Libération) avaient, en effet, fusionné fin janvier 1943. Il fallait installer dans chaque région un directoire des MUR ce qui n’était pas une mince affaire. Jacques Dhont issu de Combat fut désigné chef régional des M.U.R. pour la région R 4 (nouvelle dénomination de l’ancienne région Rose). La greffe ne prit pas et, en juin 1943, François Verdier, Forain, le remplaça.

Sans entrer dans le détail, ces changements successifs révèlent les tensions qui secouaient la résistance dans la région toulousaine. Ces tensions s’expliquaient par le fait qu’il fallait au jour le jour prendre des décisions graves sans être en mesure d’en discuter calmement au grand jour. C’est ici que François Verdier joua un rôle déterminant. Pour être reconnu chef régional des MUR, pour unifier vraiment la Résistance, il fallait une antériorité, une autorité et une légitimité incontestables. Or, François Verdier apparut le mieux placé pour fédérer les énergies qui se déployaient à Toulouse, en Haute-Garonne et dans les autres départements de la région. Il démontra sa capacité à agréger des syndicalistes, des socialistes, des chrétiens, des francs-maçons. Le Mouvement s’enracina ainsi profondément dans le terreau toulousain. Il y gagna une représentativité et une forte influence. D’autant qu’un groupe actif organisé sous l’autorité de Jean-Pierre Vernant vint s’adjoindre au noyau toulousain.

            François Verdier incarnait la Résistance ancrée dans un territoire avec toutes les solidarités et capacités d’action que cela impliquait. Il n’a pas été seul de son espèce. Dans les Hautes-Pyrénées, André Fourcade présentait un profil analogue. Marié, père de deux enfants, il était à 34 ans, en 1939, technicien à l’usine Hispano-Suiza de Tarbes. Il était par ailleurs secrétaire fédéral de la S.F.I.O. et secrétaire général de l’Union départementale des syndicats des Hautes-Pyrénées. Chef de Libération, puis des MUR pour les Hautes-Pyrénées, il devint (sous le pseudonyme de Vergnaud) chef régional des MUR à Limoges fin mai 1943 en remplacement d’Armand Dutreix. Arrêté le 2 juin 1944 par les Allemands dans le train Toulouse-Limoges, interné à la prison Saint-Michel, André Fourcade fut longuement torturé avant d’être fusillé et brûlé dans la forêt de Buzet-sur-Tarn le 17 août 1944. Désigné comme commissaire régional de la République à Limoges en décembre 1943, il fut donc, comme François Verdier, assassiné avant d’avoir pu entrer en fonction. André Fourcade et François Verdier, ces deux commissaires régionaux de la République issus des rangs de la région Rose de Libération, s’inscrivaient dans le droit fil de la plus pure tradition politique de gauche du midi toulousain.

J’ai mentionné le nom de Dutreix. Il était le chef régional de Libération de la région Émaux, c’est-à-dire la région R5. Né en 1899, Armand Dutreix, pseudonyme Verneuil, marié, père de deux enfants, avait une petite entreprise d’électricité. Militant socialiste éprouvé, il était de surcroît membre de la loge maçonnique du Grand Orient de France de Limoges : « Les Artistes Réunis ». Il fut l’unique chef régional du Mouvement jusqu’à son arrestation, le 17 avril 1943 à son domicile. Il fut fusillé au Mont Valérien le 2 octobre 1943.

            François Verdier, André Fourcade, Armand Dutreix, tous trois pionniers de la Résistance, tous trois arrêtés, mutiques sous la torture et assassinés, avaient des responsabilités qui auraient pu les dissuader de s’engager dans un combat qu’ils savaient périlleux. Mais ils avaient aussi de fortes convictions, attestées par les engagements politiques, syndicaux ou maçonniques qu’ils avaient contractés. Leur solide implantation régionale, leur aptitude à jeter des passerelles entre des milieux différents qui ne se parlaient pas volontiers, entre des courants idéologiques concurrents, voire opposés, tout cela a été décisif dans l’éclosion d’une Résistance puissante. Les risques qu’ils ont pris étaient décuplés du fait qu’ils n’étaient pas des clandestins à part entière. Ils menaient une vie publique et avaient pignon sur rue tout en étant au centre de la toile d’araignée clandestine. Ils étaient de ce fait particulièrement exposés et le savaient parfaitement. Il n’est que de lire Jean Cassou qui, dans La mémoire courte en 1953, évoquait ses morts à lui, ceux qui l’accompagnaient, et parmi ces êtres chers « François Verdier, dit Forain, chef régional de Toulouse, qui dans sa belle villa, au milieu de ses livres et de ses œuvres d’art, disait plaisamment qu’il pourrait bien rester tranquille, la vie était assez belle pour lui sans besoin d’aller chercher toutes ces histoires… »

            Comme ses camarades, François Verdier a laissé sa vie dans ce combat après avoir enduré des souffrances inimaginables. Ce qui pose une question que Jean Paulhan, dissimulé sous le pseudonyme de Juste, abordait dans le numéro 3 des Cahiers de la Libération, revue de prestige de Libération-Sud, en février 1944, au lendemain même de l’assassinat de François Verdier. Cette interrogation taraudait les résistants et constitue pour celles et ceux qui sont ici aujourd’hui une sorte d’énigme en même temps qu’une source de vive admiration. Comment, quand on aspire passionnément à vivre, peut-on mettre sa vie en jeu en connaissance de cause au nom de valeurs qu’on chérit ? Évoquant « la douleur d’un temps où nous apprenons chaque mois la mort de quelque ami », Paulhan répondait en ces termes : « L’un tenait le maquis, on a retrouvé son corps, dans un champ, déjà gonflé. Un autre faisait des tracts, un autre encore transmettait des notes : ils ont été troués de balles, quand ils chantaient. D’autres ont souffert, avant la mort, des tortures qui passent en horreur les souffrances du cancéreux et du tétanique.

Et je sais qu’il y en a qui disent : ils sont morts pour peu de chose. Un simple renseignement (pas toujours très précis) ne valait pas ça, ni un tract, ni même un journal clandestin (parfois mal composé). À ceux-là il faut répondre :

C’est qu’ils étaient du côté de la vie. C’est qu’ils aimaient des choses aussi insignifiantes qu’une chanson, un claquement des doigts, un sourire. Tu peux serrer dans ta main une abeille jusqu’à ce qu’elle étouffe. Elle n’étouffera pas sans t’avoir piqué. C’est peu de chose, dis-tu. Oui, c’est peu de chose. Mais si elle ne te piquait pas, il y a longtemps qu’il n’y aurait plus d’abeilles.”

            Je ne peux clore mon propos sans soulever une autre question qui nous intéresse, nous qui avons choisi ce jour de prendre le chemin de la forêt de Bouconne. Quelle est la raison d’être d’une commémoration comme celle qui a lieu ce 28 janvier 2024 ? D’aucuns doutent de l’utilité de telles cérémonies. Ce n’est pas mon cas parce que je fais miens ces mots de Vladimir Jankélévitch :

« Si nous cessions d’y penser, ils seraient définitivement anéantis et nous achèverions de les exterminer. Les morts dépendent entièrement de notre fidélité. »

 

Discours de Florence Aubenas, Journaliste Grand reporter et écrivaine

Vidéo de l’allocution de Florence Aubenas

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Chers Amis,

Je dois vous dire d’abord mon émotion de prendre la parole devant vous et je mesure l’honneur qui m’est fait de le faire devant ce mémorial pour parler de François Verdier, sur le lieu même de son assassinat. Vous tous qui êtes ici, vous le connaissez sans doute bien que moi. Famille, amis vous savez son intimité, vous savez sa profondeur et vous avez su raconter l’homme à travers les années. Spécialistes et historiens, vous avez décrit le résistant, le franc-maçon. Vous avez parlé de son engagement et celui de son réseau, Libération-Sud. Dans la clandestinité, on écrivait peu, on effaçait toutes traces. Et comment pourrait-il en être autrement à ces heure-là où chaque mot pouvait signifier une condamnation à mort.

Grâce à vos soins à enquêter, à raconter cette vie, à raconter ces faits, cela revêt aujourd’hui une importance presque religieuse. Oui c’est grâce à vous que l’histoire et la mémoire nous reste 80 ans plus tard.

Je me souviens d’un reportage réalisé voilà quelques années dans un lycée de France, pour savoir quelles images gardaient les jeunes gens aujourd’hui des résistants d’hier. Tous ou presque ont fait le même portrait : qui étaient-ils ? l’image était à peu près celle de Che Guevara. C’étaient des jeunes gens romantiques, portant armes avec des t-shirt moulants, et ce type de figure. Aucun ne voulait croire par exemple que Jean Moulin avait pu être préfet. Sachant que je serai aujourd’hui parmi vous, j’ai voulu faire à peu près le même sondage et je suis allée dans un lycée. J’ai parlé de François Verdier. Là encore, cette semaine, j’ai obtenu les mêmes réponses et les mêmes images. Rarement on m’a dit, en découvrant le visage de François Verdier sur une photo, c’était lui le résistant ? oui c’était lui. Les résistants de la première heure ne faisaient ni politique ni exercice de style. Ils pouvaient diriger une entreprise de machines agricoles, siéger dans un tribunal de commerce, porter cravate et légère calvitie plutôt que treillis et béret. Car c’est peut-être cela le mystère d’un engagement qui nous sidère aujourd’hui, tant de décennies plus tard. De quelle pâte humaine étaient-ils faits ceux-là qui ont tout abandonné pour s’engager au moment où un pays entier s’effondrait ? Quelle foi fallait-il avoir pour y croire, pour penser que la Résistance allait gagner alors que tout semblait prédire le contraire. De même, quelles forces les portaient pour être convaincus que la défaite et l’humiliation générale ne dureraient pas toujours. Pensaient-ils aussi, comme ma grand-mère qui habitait tout près d’ici dans un village à trente kilomètres de Toulouse, que le nom du général De Gaulle qui les appelait à résister et à continuer la guerre, ne pouvait être qu’un pseudonyme. C’était trop beau pour être vrai. Se sont-ils eux-mêmes poser ces questions ?

Je voudrai ici rendre un hommage tout particulier à Jeanne Verdier et pas simplement parce qu’elle était une des dernières destinataires, avec toute sa famille, des derniers mots de son mari, retrouvés dans ses poches et écrits, nous l’avons appris par Elérika Leroy, sur les papiers qu’ils avaient pu trouver en sortant des salles de torture, sur un morceau d’enveloppe, sur du papier à cigarette, sur du papier toilette. Il s’adressait à sa famille tout ce qu’il avait pu trouver en sortant de là. Jeanne Verdier née Lafforgue, institutrice, n’était pas seulement l’épouse à qui l’on écrit. Elle-même était résistante dans le réseau Gallia, agent de renseignement. Arrêtée quelques jours après son mari, elle a été déportée dans un camp pour femmes à Ravensbrück. Libérée en 1945, elle fut élue maire et a dirigé la Fédération des déportés. Qu’elle soit saluée ici, femme de l’ombre, sortant de l’ombre.

Il me faut aussi parler de vous, vous qui êtes ici, sans autre lien avec François Verdier que votre seule conviction qu’il n’est de meilleur endroit, ce dimanche matin, que de vous rassembler ici pour parler de lui. C’est le seul moment où devant cette stèle, modeste et immense, dans une forêt de France, nous commémorons la Résistance. Votre présence ici, renouvelée d’année en année, de génération en génération, comme un témoin qu’on se passe, en a fait un endroit unique, loin de ce petit rassemblement du lendemain de la Libération de Toulouse où quelques amis sortant d’un café et allant visser une plaque célébrant François Verdier à la place du maréchal Pétain. Ici notre engagement est là essentiel comme il l’était hier. Et en vous regardant l’un après l’autre, l’une après l’autre, je vois dans chacun de vous le visage vivant de François et Jeanne Verdier. Merci à vous de m’avoir conviée dans votre chaîne humaine en ces temps où la paix en Europe paraît à nouveau si fragile.

Je me tourne ici vers un monument qui n’est pas un monument aux morts mais celui des vivants. Merci à vous tous.

Interprétation de l’Affiche Rouge par Sarah Lugassy

Vidéo de Sarah Lugassy chantant en forêt

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Les élèves ont clôturé la cérémonie en accompagnant les représentants officiels déposer les gerbes au pied du monument honorant François Verdier. A chaque fois, ils ont laissé un carnet et une fleur en mémoire du petit journal carcéral qui fut retrouvé sur le corps de François Verdier le 27 janvier 1944.

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Portrait réalisé par Matt2 SteetArt

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Achille Viadieu

Collection Famille Viadieu
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Collection Famille Viadieu

Achille Viadieu

1911-1944

 

La tourmente des années noires révèle parfois quelques destins exceptionnels. La vie d’Achille Viadieu est, en apparence, celle d’un homme tranquille. C’est en réalité une double vie extrêmement dangereuse que mène celui qui est officiellement un responsable régional de premier rang d’un parti politique fasciste et ultra- collaborationniste.

Achille Viadieu était en réalité “X-2” l’adjoint de Morhange.

Intégré au cœur du dispositif nazi et vichyste, ce chef de la collaboration récupérait, au péril de sa vie, des informations capitales pour la Résistance.

 

 

 

Achille, l’Ariégeois

Collection Famille Viadieu

Collection Famille Viadieu

Achille Viadieu est né le 11 mars 1911 à Castelnau-Durban près de Rimont en Ariège. Enfant, il est confié à sa grand-mère à Toulouse où il effectue sa scolarité. Après des études de droit, il retourne en Ariège. Il devient clerc de notaire à Foix et se marie avec Aline Nigoul. Le couple donne naissance à deux enfants, Pierre en 1934 et Éliane en 1935.

Collection famille Viadieu

Collection famille Viadieu

A Foix, Achille Viadieu est très investi au sein du parti radical socialiste. Il est de toutes les réunions et n’hésite pas à donner un coup de main au service d’ordre si nécessaire. Achille Viadieu est également grand amateur de chasse et part régulièrement avec ses chiens dans ses Pyrénées ariégeoises.

En 1937, Achille trouve un poste à la gare Matabiau au service Économat des Chemins de fer du Midi. La famille s’installe en 1938 au 35 rue Valade à Toulouse. En septembre 1939, à la déclaration de guerre, il rejoint une compagnie d’Aérostiers jusqu’à la démobilisation. Achille Viadieu a alors 29 ans.

Collection Famille Viadieu

Collection Famille Viadieu

Nous ne savons quasiment rien des activités d’Achille Viadieu, dit Ginou,, entre 1940 et 1943. Le colonel Paul Paillole, dans ses mémoires « Services secrets 1935-1945 », dit qu’Achille Viadieu se serait engagé dans la résistance dès décembre 1940.

Rencontre avec Morhange et double-jeu

Jacques Combatalade, « Jacky », policier du réseau, raconte qu’Achille et Marcel Taillandier se seraient rencontrés en mai 1943. Achille fréquentait des lieux et des amis communs.

Collection Famille Viadieu

Portrait officiel. Collection Famille Viadieu

Achille Viadieu accepte de devenir X2 au sein du tout récent Réseau Morhange. Marcel Taillandier le confirme dans son double rôle, collaborateur notoire le jour, résistant la nuit. Le réseau Morhange est un formidable groupe de Résistance, créé et dirigé par Marcel Taillandier « Morhange » rattaché aux services spéciaux du commandant Paul Paillole à Alger. Achille Viadieu est homologué Agent P2 au sein des Services Spéciaux Militaires Français.

Achille Viadieu travaille étroitement avec André Bousquet « Cadum », inspecteur aux renseignements généraux. Dès l’été 1943, il parvient à infiltrer le Rassemblement national populaire, le RNP. Le 15 octobre 1943, Achille se rend avec ses chefs du RNP, Blanc et Bouniol à Paris sur convocation de Marcel Déat au Comité Central du RNP présidé par Albertini qui le désigne chef départemental du RNP de l’Ariège. Déat leur donne comme directives d’obtenir des renseignements politiques sur les fonctionnaires, de recruter des militants sur le modèle du PPF et de se mettre en relation avec les polices françaises et allemandes.

Trois jours plus tard, de retour à Toulouse, avec la complicité d’André Bousquet, il organise la neutralisation de ses rivaux. Conduits au château de Brax, Blanc et Bouniol sont interrogés et exécutés. Quelques jours après, il devient chef régional du RNP, adoubé par Marcel Déat.

Dès lors, les relations d’Achille Viadieu approchent le cœur du dispositif de répression nazi à Toulouse. Il invite ainsi à sa table des officiers du SD (Sicherheitsdienst, Service de sûreté, communément raccourci en Gestapo), en particulier le redoutable Stubbe et l’un de ses adjoints, Lehmann. Leur arrivée rue Valade était toujours bruyante, claquant les bottes si fortement, qu’ils terrorisaient le jeune Pierre. La fille d’Achille, Eliane, se souvient très bien de ces visiteurs peu sympathiques. Lors de ces invitations, Marcel Taillandier était parfois présent.

ROUS RNP

Pierre Rous

C’est à partir de novembre 1943 que les archives de la SNCF signalent les « absences irrégulières » de leur agent Achille Viadieu. Effectivement, Viadieu n’a plus le temps de faire semblant, il est de la plupart des actions du réseau. Début novembre 1943, il met à profit ses nouveaux moyens, véhicule, ausweiss , faux-papiers en tout genre et autres, pour une action de neutralisation d’un belge au service de la Gestapo à Narbonne. Cette action est organisée par Pierre 21_111-4Rous, X3 du réseau Morhange. « Homme exceptionnel » selon Daniel Latapie, historien de la Résistance en Haute-Garonne, Pierre Rous était sans nul doute un homme aux milles ressources et aux talents multiples comme ses relations dans le milieu toulousain.

Infiltration de la Gestapo française de la rue Lauriston

Les relations d’Achille Viadieu et de Pierre Rous pouvaient permettre à Morhange d’infiltrer les milieux de la Gestapo parisienne française, en particulier celle du 93 rue Lauriston, la bande Bony-Laffont ou « la Carlingue ».

Nous savons peu de choses sur cette infiltration, mais toujours est-il que Pierre Loutrel dit « Pierrot le fou » semble avoir joué un rôle non négligeable auprès de Morhange. De fait, le « gangster » a rejoint le réseau à Toulouse à l’été 1944.

Début mars 1944, Achille se rend à Paris avec Jacques Combatalade, X5, officiellement pour la cérémonie du 50ème anniversaire de Marcel Déat. Parallèlement, Marcel Taillandier et Pierre Rous tentent  d’infiltrer l’immeuble de la rue Lauriston.

Peut-être Pierre Loutrel a-t-il joué un rôle quand quelques jours plus tard quatre hommes de la bande Bonny-Lafont sont venus à Toulouse pour supprimer Morhange ? Achille Viadieu, averti, a ainsi pu les duper et les convaincre de venir au domaine de Gagen près de Saint-Lys où un groupe de résistants de Morhange les attendait. Une fusillade a éclaté et les quatre hommes ont été tués et enterrés dans le jardin du domaine.

Démasqué en Espagne

En mai 1944, Achille se rend à Barcelone avec Marcel Taillandier, Calle Montaner dans une antenne des services spéciaux français Leur PC est établi dans une boite de nuit « la Buena Samba » réquisitionnée par les Services.

Marcel Taillandier et Achille Viadieu y sont photographiés par des agents nazis infiltrés calle Montaner.

De retour à Toulouse, ils apprennent qu’Aline Viadieu a été interrogée par les officiers du SD. Les Allemands souhaiteraient revoir les gens qui se trouvaient avec eux à déjeuner rue Valade la dernière fois. Il s’agissait de Marcel Taillandier et de Pierre Rous. Lehmann a laissé repartir Aline, qui terrorisée est partie se cacher avec ses enfants.

Taillandier ordonne à Achille Viadieu de partir immédiatement en Espagne avec sa famille. Le départ est prévu le 3 juin à l’aube.

La dernière opération

Jacky COMBATALADE

Jacky COMBATALADE

 La veille du départ, dans la soirée du 2 juin 1944, Achille est avec Jacky Combatalade. Ils décident de s’arrêter dans un café de la place du fer à cheval. Ils y retrouvent leurs camarades en train de préparer une action imminente contre un résistant passé au service de la Gestapo. Il manque une voiture pour boucler le dispositif. Achille convainc Jacky.

Le rendez-vous est fixé le soir même sous l’horloge du Capitole.

Achille Viadieu et Jacques Combatalade ne sont là que pour assurer la surveillance depuis leur traction. Découvrant la présence d’Allemands cachés sous les arcades, ils font le tour de la place pour prévenir les autres membres de l’opération. La Gestapo, dissimulée sous les arcades aux côtés des Stosstruppen (troupes de choc) français, a reconnu Achille Viadieu. La voiture des deux résistants est aussitôt  mitraillée et pourchassée dans les rues de Toulouse.

VIADIEUJacques Combatalade au volant, essaie de semer les poursuivants. Sa traction dérape au carrefour de la rue des Récollets dans le quartier saint-Michel. Achille Viadieu a à peine le temps de sortir de la voiture. Une rafale de mitraillette le tue sur le coup.

Jacques Combatalade, gravement blessé, est conduit à l’hôpital Purpan puis à la prison St Michel. Le réseau parviendra à le libérer quelques semaines plus tard.

Achille Viadieu fut élevé au grade de Capitaine à titre posthume.

Texte Elérika Leroy

Un merci tout particulier à Éliane Viadieu pour ses photographies familiales qui permettent de montrer Achille Viadieu autrement. Jusqu’à présent, un seul portrait officiel  existait.

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Plaque rue Achille Viadieu, Toulouse.

Cérémonie 2017

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Merci à eux, pour leur engagement, leur abnégation, leur fidélité aux valeurs, principes, vertus de la République, ils nous ont appris, « qu’il est des temps si difficiles où pour vivre il faut parfois mourir. »

 

La forêt de Bouconne a accueilli ce dimanche 29 janvier 2017 la 72ème cérémonie d’hommage à Forain François Verdier .
Les élèves de troisième du collège Jean Jaurès de Colomiers ont présenté le travail préparé avec leurs enseignants. L’hommage des collégiens était empreint d’une grande humilité, leur interprétation de la vie et du combat de François Verdier était émouvant et touchant.

 

Ce commencement de fraternité qui s’appelle tolérance. Victor Hugo, cité par Madame Camps, principale du collège Jean Jaurès de Colomiers

 

 

Les jeunes interprètent "la dédicace à Antonio Machado, poète" de Juan Manuel Serrat

Les jeunes interprètent « la dédicace à Antonio Machado, poète » de Juan Manuel Serrat

Les vidéos:

 

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« Pour espérer, ne rien craindre » disait François Verdier.

Mot du Président du Mémorial Alain Verdier

P1130148Mesdames et Messieurs, mes amis.

Un front d’horreur et de barbarie nous a enveloppé tout au long de l’année écoulée.

L’obscurantisme, le racisme, la xénophobie chaque jour remettent en question nos valeurs républicaines qui ont fait la grandeur de la France.

Mes amis, nous avons un immense devoir de mémoire et les circonstances internationales actuelles nous le démontrent chaque jour davantage.

 En 1940, les troupes nazies envahissaient l’Europe installant un régime totalitaire, au nom d’une idéologie raciste, conquérante, morbide.  Installant en France le terrible gouvernement de Vichy.

Abolition des droits et libertés républicaines, Antisémitisme, Déportation, Service du Travail Obligatoire.

Peu nombreux  furent ces femmes et ces hommes qui indignés, eurent le courage de relever la tête et d’entrer en Résistance.

François Verdier était de ceux-là…

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Ouvert sur le monde, Membre de la Ligue des Droits de l’Homme, Juge consulaire au tribunal de commerce de Toulouse ;  Citoyen attaché , à la Justice, à la liberté de conscience,  d’opinion, d’expression. Sa Liberté de penser.

 Courageux, il va s’engager jusqu’à l’abnégation.

 Aujourd’hui, 29 janvier 2017, nous voici une nouvelle fois réunis, pour rendre hommage à cet homme qui devint le Chef régional des Mouvements Unis de la Résistance, « Forain…François Verdier » assassiné par le fanatisme, le fascisme, la barbarie, sur le bord de ce chemin forestier..

C’est un hommage à la  Résistance française. A ces civils, devenus combattants pour le rétablissement de notre République laïque, Une et Indivisible.

La Laïcité : étant le principe fondateur pour conjuguer notre unité.

Hommage à la Résistance qui a toujours eu la claire conscience de ses devoirs et ses hautes responsabilités.

Sans elle, sans des hommes comme Forain, le chercheur dans son laboratoire, le paysan dans son champ, l’ouvrier dans son usine  porteraient l’uniforme du Nazisme, dans une servitude qui s’étendrait à la pensée.

Hommage à la Résistance : C’est mettre en avant, cette volonté de victoire de la Liberté sur  l’oppression ,  pour le rétablissement d’une démocratie économique et sociale.

C’est ne pas oublier  les acquis économiques et sociaux hérités du Conseil National de la Résistance. , qui démantelés au fil du temps, subissent encore de fortes attaques.

  • Le droit au travail, le droit au temps de repos, Un plan complet de sécurité sociale.
  • La retraite pour tous.
  • Et particulièrement le droit à une instruction égalitaire.

 Ils nous rappellent l’Universalité des principes pour lesquels la Résistance a combattu.

Les découvertes du XXème siècle ont apporté une évolution des technologies, des communications, L’ère de l’internet, de l’instantané, l’économie est devenue mondiale.

Une société nouvelle se révèle.

Un nouveau monde dont personne n’est maître mais qui se construit pierre par pierre aux prix d’efforts soutenus.

Nous les héritiers, Vous les collégiens ici présents qui êtes la société de demain, à qui les épreuves qu’ont connus les Résistants ont été épargnés grâce au sacrifice d’hommes comme François Verdier, nous tous, devons affirmer notre volonté de lutte, quelques soient nos origines, nos conceptions, afin que soient conservés les valeurs que nous a transmise la Résistance.

La souveraineté de la France, la Liberté, les Droits de l’Homme, la Dignité humaine…

« Pour espérer, ne rien craindre ». disait François Verdier.

M’adressant à vous les collégiens : Vous avez un devoir

A l’exemple de François Verdier, réinventez nos valeurs fondamentales, recréez la confiance, comprenez la solidarité, le sens des responsabilités, refusez le chaos.

Devenez des femmes, des hommes libres, conscients de votre humanité, respectueux de l’Universalité de la dignité humaine.

Faites de notre bien commun qu’est la Terre un monde plus apaisé.

Je vous remercie de votre attention.

Alain Verdier

 

 Discours de Georges Méric, président du Conseil départemental de la Haute-Garonne

Dimanche 29 janvier 2017

P1130194 Dans cette forêt de Bouconne se mêlent dans nos mémoires, à la fois le souvenir d’un homme d’exception au destin tragique et les remarquables allocutions de nombreuses personnalités qui se sont succédées à ce pupitre pour évoquer l’engagement de Forain.

Étant un enfant de l’après-guerre et n’étant pas historien, c’est avec humilité et émotion que j’interviendrais, en évitant de me lancer dans une grande fresque historique, mais en évoquant les valeurs de la Résistance en notre temps troublé, dangereux, dans un monde en bascule.

Notre temps, est en effet traversé de crises multiples : Crises terroristes. Crises économiques et financières. Crises politiques. Crises environnementales. Crise de valeurs.

Un présent qui nous convoque, nous tous, à relever de formidables défis :

  • Défis contre la volonté de ceux qui souhaitent diviser et soumettre par la peur,
  • Défis contre le repli sur soi, mettant en avant un individualisme forcené et le repli identitaire,
  • Défis contre les dérives communautaires,
  • Défis contre la montée des populistes xénophobes,
  • Défis contre ceux qui divisent l’humanité, en fidèles et hérétiques, en blancs et noirs, en riches et pauvres, en gens d’ici et gens d’ailleurs,
  • Défis contre la misère sociale et la désespérance,
  • Défis contre les atteintes aux valeurs, principes et vertus de la République.

C’est dans cette société profondément troublée, divisée, qu’il nous revient de nous ressourcer aux valeurs de la Résistance, aux devoir de mémoire des engagements exemplaires à l’image de François Verdier.

Durant les années de ténèbres, les années sordides, dangereuses, inhumaines, années de l’occupation nazie, années de la collaboration, de la servitude, oui, des femmes et des hommes se sont levés, pour dire non, non à l’inacceptable, non à l’intolérable, non au fascisme, au nazisme.

Mes chers amis, le seuil de l’intolérable est atteint lorsque la dignité humaine est bafouée,  foulée aux pieds. Le seuil de tolérance est rompu au non-respect de la personne humaine, par ignorance, par peur, par xénophobie, par racisme, par irresponsabilité.

« Il nous faut donc réclamer, au nom de la tolérance, le droit de ne pas tolérer l intolérant. » Karl Popper.

Rendons hommage aux femmes et aux hommes de la Résistance, qui ont su dire non à l’intolérable, qui ont su faire vivre les valeurs de la République, qui ont su affirmer le nécessaire respect de la dignité humaine, qui ont osé faire face à l’occupant nazi, à sa doctrine d’asservissement raciste et fasciste, à l’outrance de la barbarie, à la volonté d’oppression de soumission.

 

Ils ont su résister face à la peur, au danger, à la terreur, à l’épouvante totalitaire. Ils se sont dressés au péril de leurs vies, de celles de leurs familles, de leurs proches, de leurs amis.

Face à la terreur ils ont su opposer le propre de l’humain, leur esprit, leur faim de connaissances, de liberté, d’amour.

Ces femmes et ces hommes venant d’horizons politiques, philosophiques, métaphysiques différents, de conditions sociales différentes, des prolétaires et des bourgeois, ont su créer une fraternité de combat et de souffrance parce que la Résistance est un état d’esprit de liberté, de tolérance et de respect de l’humain.

La Résistance est aussi cette volonté de transgression d’un ordre établi créé par l’ambiguïté de la constitution de l’état français de Vichy.

Ces combattants de l’ombre, ces héros trop souvent ignorés, se sont unis devant l’essentiel : les valeurs de la République fondées sur la devise : Liberté-Egalité-Fraternité.

Commémorer la Résistance, n’est pas seulement parler du passé et assumer un devoir de mémoire, mais c’est aussi s’inscrire dans l’espérance pour demain.

Car aux cris des torturés, au silence des assassinés, à l’absence des disparus, aux marques indélébiles des survivants, doit faire écho aujourd’hui la conscience responsable des citoyens et l’espérance en l’avenir par la volonté de rencontre, de partage, de fraternité, d’amour.

« Le passé est fondement de notre présent et garant de notre avenir. »

La Résistance, cette armée de l’ombre, cette unité des diversités dans la difficulté et la souffrance, cette fraternité des différences dans l’engagement, est un enseignement qui fonde l’avenir et apporte une lumière qui éclaire nos comportements, nos engagements, notre éthique.

Forain François Verdier étaient l’un d’eux.

Qui était donc cet homme ?

C’est par son engagement professionnel que François Verdier s’est d’abord révélé.  En dirigeant une entreprise de grossiste en machines agricoles. Son sens de l’organisation, sa volonté, sa capacité de travail lui permettent de réussir. Devenu un notable, il est reconnu par ses pairs, et devient juge au tribunal de commerce de Toulouse.

Mais, François Verdier est un humaniste, il s’engage au sein de la Ligue des droits de l’homme et entre en Franc Maçonnerie au sein de la loge les « cœurs réunis » du Grand Orient De France à l’Orient de Toulouse.

Les temps de guerre vont lui permettre de démontrer son courage, sa détermination, son opiniâtreté fondés sur ses valeurs humanistes, universalistes et républicaines, mettant en danger sa famille, sa femme Jeanne et ses enfants, ses proches, ses biens.

Déjà engagé auprès des Républicains espagnols en participant à la collecte et à l’envoi de matériels en Espagne, en insoumis à l’occupant, en défenseur en droits universels, il entre en Résistance.

Il démontre son efficacité au sein du NAP, le Noyautage des Administrations Publiques, avant de prendre d’autres responsabilités au sein du mouvement Libération-Sud.

A partir de mai 1943, il relève le défi d’unifier la Résistance. Forain est désigné par le général de Gaulle pour être le commissaire de la République dans la région, il devient le chef des Mouvements unis de Résistance. Volontaire, rigoureux, méthodique, il crée une organisation efficace.

Comme d’autres grands résistants, tels Achille Viadieu ou Raymond Naves, François Verdier mène une double vie entre activités clandestines et vie officielle rangée.

Il est arrêté dans la nuit du 13 décembre 1943 par la police allemande, lors d’une vaste opération de la gestapo, contre la résistance régionale. 110 personnes sont arrêtées cette nuit-là.     

Pendant 44 jours et 44 nuits, il endurera, sans parler, l’épouvante des interrogatoires de la gestapo en cette demeure maudite des avenues Frédéric Mistral, il sera assassiné le 27 janvier 1944 en ces lieux et retrouvé défiguré par l’explosion d’une grenade dans la bouche. Mais son organisation de résistance restera opérationnelle. Sa femme Jeanne fut déportée au camp de Ravensbrück.

Ainsi, dans des circonstances extraordinaires, la guerre, un notable de province, humaniste, universaliste, républicain, au caractère bien trempé, est devenu un héros. Forain demeure avec toutes les femmes et hommes de la Résistance des exemples, nous permettant de nous ressourcer en ces temps difficiles et dangereux.

Merci à eux, pour leur engagement, leur abnégation, leur fidélité aux valeurs, principes, vertus de la République, ils nous ont appris, « qu’il est des temps si difficiles où pour vivre il faut parfois mourir. »

 

Je souhaiterais ici devant la stèle de François Verdier rendre hommage à Louis-Marie Raymondis.

Il est des rencontres éclairantes, décisives, déterminantes.

Il est des rencontres fondatrices, émancipatrices, qui enrichissent votre esprit, ouvrent de nouvelles portes, des rencontres marquantes qui permettent d’avancer vers une complétude, un accomplissement toujours en devenir.

J’ai pu vivre trois ou quatre rencontres de ce type, lorsque, un inconnu, qui est un phare pour la conscience réfléchie, devient un rendez-vous. Rendez-vous qui fait mûrir, rendez-vous qui fait grandir dans un entendement émancipateur.

Ces phares de l’esprit qui marquent une vie, sont des êtres de caractère, à la vie particulière, originale, accomplie. Ils dégagent une puissance et une aura intellectuelle éclairante, mais demeurent d’un abord facile, avec une disponibilité, une humilité. Ils développent un discours limpide avec une maîtrise des concepts et des idées, ils savent écouter pour comprendre et échanger.

Louis-Marie est un de ces phares, un de ces rendez-vous qui éclaire la vie, avec sa fabuleuse facilité de communication, sa connaissance encyclopédique, avec sa bienveillance et la clarté de son propos qui mettent en confiance et tirent vers le haut.

Avec sa volonté de partage, d’échange, surtout quand vos choix montrent une divergence avec les siens. Il avait cette capacité de rassembler ce qui semble épars dans une volonté de compréhension et de complémentarité, en allant à l’essentiel, faisant évanouir les oppositions en dessinant une co-existence dans une unité.

Louis-Marie est un intellectuel puissant et lumineux, disponible et affable, mais aussi un révolté, un transgresseur qui a su dire non à l’intolérable, un chrétien authentique dégagé des oppressions cléricales (des conformismes), un humaniste qui vivait l’Agapè avec humilité et bienveillance, il portait une lumière qui éclairait vos vies.

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