Portraits de Résistance

Mémorial de Caen
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Ils nous avaient volé la Liberté et l’Égalité, ils n’avaient pas pu interdire la Fraternité.  Lucie Aubrac

Quelques portraits de combattantes et combattants de la Résistance de la région sont présentés ici par ordre alphabétique.
Régulièrement enrichie, vous pouvez contacter le Mémorial pour compléter cette page.

 

 

 

 


ACHIARY Hentiette coll DLHenriette ACHIARY

Elle combattait dans l’ombre dans les rangs de la résistance socialiste aux côtés de son mari qui avait transformé son bureau de la Maison de la Mutualité, en Quartier Général des résistants regroupés autour de Raymond Naves. Traqué par la Gestapo, le couple a du fuir à Pris en vain. Les services allemands les ont retrouvés. On a jamais revu Henriette Achiary.


 

07_41Pierre BERTAUX

Brillant universitaire, Bertaux est nommé à Toulouse en 1938 comme professeur d’allemand. Il participe aux côtés de Silvio Trentin aux actions en faveur des Espagnols. En 1941, il créé le premier réseau de résistance à Toulouse, le réseau Bertaux.

 


BET ROSINARosine BET dite Paulette Cavérac

D’origine italienne, elle rejoint les FTP-MOI du Lot et Garonne. Rosine est tuée dans une opération contre la propagande allemande avec ses deux camarades, Enzo Godéas et David Freiman en mars 1944.

 


CAROVISAlbert CAROVIS dit Jean

Albert Carovis fut le « patron » de la Résistance civile à la Libération. Dès 1940, il avait réagi au régime de Vichy. Il réunit autour de lui un groupe d’amis qui se structure et devient progressivement l’un des maquis les plus actifs et les mieux organisés de la Haute Garonne.

 

 

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Jean CASSOU dit Alain

Ecrivain et poète aux origines béarnaise et andalouse, c’est un intellectuel de la génération d’Aragon, Eluard ou Sartre. Engagé dans le combat contre les fascistes dès 1940 à Paris , il est poursuivi par la police et se réfugie à Toulouse. Homme au charisme incontestable, forçant le respect, De Gaulle le choisit pour incarner son autorité dans la région toulousaine après la Libération.

 




chaubetJean CHAUBET

Instituteur, il est révoqué par Vichy en raison de ses opinions politiques et philosophiques. Il se consacre dès 1940 à la création d’un groupe de résistance qu’il développe progressivement au contact des autres organisations.Jean Chaubet a été l’un des membres fondateurs des Mouvements Unis de Résistance aux côtés de François Verdier et Raymond Naves.


 

img004Yvonne-Lucienne CURVALE (1903-1962)

Elle s’engage dans la Résistance dès 1940 puis intègre le Mouvement Libération-Sud en octobre 1941. Responsable du « service social », elle devient agent de renseignement et participe au noyautage des administrations publiques (NAP). Elle rejoint ensuite le réseau d’évasion Gallia où, en plus de la diffusion de la presse clandestine, du renseignement et des liaisons, elle s’occupe des évadés. Dénoncée, elle est arrêtée chez elle dans la nuit du 13 au 14 décembre 1943, par la Gestapo au cours de ce que la police allemande appela « l’opération de minuit ». Internée à la prison Saint Michel, elle est déportée via Compiègne au camp de Ravensbrück. Elle fut libérée le 10 avril 1945 par les troupes américaines


19400522_Fiançailles detailAngèle DEL RIO BETTINI

Du haut de ses 18 ans passionnés, elle a participé, aux cotés de son fiancé Yves, à la première action de la Résistance à Toulouse le 5 novembre 1940. Elle l’a payé cher, jugement d’un tribunal militaire, déchéance de nationalité et internement pendant 4 ans.

 


 

 

dideMaurice DIDE

Spécialiste en psychiatrie de renommée internationale, haut fonctionnaire à la retraite, le docteur Maurice Dide ose se rebeller et s’engager dans le combat clandestin. Des évasions par les Pyrénées au sabotage minutieux des services de l’administration vichyste, dont il organisait le noyautage, Maurice Dide s’investit sans compter dans le combat de la Résistance. Courageux, il le fut jusque dans la boue du camp de concentration de Buchenwald.

 

 


 

DISSART M.Louise

Marie-Louise DISSARD dite Françoise

Une femme à la personnalité exceptionnelle, Françoise a su réorganiser un réseau d’évasion sur l’ensemble de la région.

 

 


FiksmanAriane Scriabine Fiksman Sarah, Régine

D’origine russe, exilée à Paris, Ariane est une artiste et une poétesse à la personnalité exacerbée. En mai 1940, elle se convertit au judaïsme et engage des premières actions pour alerter l’opinion publique juive avec son mari, le poète David Knout Fiksman. Installés à Toulouse, le couple met en place une organisation juive de combat…

FONVIEILLE M portrait offMaurice Fonvieille

Instituteur, militant socialiste et franc-maçon, il a le sens de l’engagement chevillé au corps. Il rejoint le mouvement Libérer et Fédérer et en devient un chef régional avant d’être arrêté par la Gestapo en février 1944.

 

 

 


Boris Frenkel-BoursierBoris FRENKEL , 35 005

Étudiant en lettres, juif et communiste, il rejoint la 35e Brigade FTP-MOI. Il fut l’un des membres les plus actifs de la brigade, et c’est lui qui venge la mort de son chef Marcel Langer en abattant un soldat allemand rue Bayard. Arrêté en août 1943, il est condamné par la justice française qui le livre aux Allemands. Il meurt au camp de Mauthausen en mars 1945.


Léo Hamard

Léon HAMARD dit Léo

Originaire de Lorraine, Léo Hamard était policier à la 8ème brigade de sûreté. Proche du résistant Jacques Combatalade, il intégre le réseau Morhange aux côtés de Marcel Taillandier. Il est arrêté par la Gestapo le 11 juillet 1944 en même temps que Morhange. Léon Hamard meurt sous la torture. Son corps a été retrouvé après la libération, enterré dans le jardin de la villa occupée par la police nazie.

 


 

Jacob Insel Collection ADHG

Jacob INSEL dit Jacques

Proche de Marcel Langer, Jacob Insel, Polonais, a connu l’exil en Palestine, puis en France, la Guerre d’Espagne et les Brigades internationales. A la mort de Langer, Jacob Insel devient le responsable militaire de la 35 ème Brigade, avant d’être arrêté et déporté dans le « Train fantôme ».


 

Février 1943 C. ADHG

Mendel LANGER dit Marcel

Polonais, exilé en Palestine, puis en France, combattant des Brigades Internationales en Espagne, Mendel Langer est le fondateur de la 35ème Brigade FTP-MOI. Il fut le seul résistant guillotiné à Toulouse.

 


 

LAUTMAN AlbertAlbert LAUTMAN dit Langeais

Philosophe des mathématiques, ami de Cavaillès, Albert Lautman est fait prisonnier en 1940. Évadé, il rejoint Toulouse et s’engage aux réseaux d’évasion Pat’O Leary et Françoise. Il est arrêté en mai 1944 et déporté dans le convoi du « Train fantôme ». Les nazis l’exécutent près de Bordeaux.

 

 


LION

Henri LION

Maître-Imprimeur, Henri Lion et son frère Raoul avaient chacun un atelier. Libertaires, les frères Lion ont mis leurs presses au service de toute la Résistance. Des faux-papiers aux journaux clandestins, les imprimeries oeuvraient pour toute la région. Dénoncés et piégés par la Gestapo, les frères Lion, d’autres résistants et tout le personnel furent arrêtés et déportés.


 

NAVESRaymond NAVES dit Leverrier, Granger

Professeur, il entre dans le combat clandestin aux côtés des ses étudiants avant de prendre la tête de l’organisation militaire de la Résistance dans la région. Chef charismatique du Parti socialiste clandestin, il avait été choisi pour être le Maire de Toulouse après la victoire. Malgré le danger, Raymond Naves refuse d’abandonner ses élèves et continue d’enseigner. Arrêté sur le chemin de la Faculté de Lettres par la Gestapo, il meurt à Auschwitz en mai 1944.

 


NITTI F FranciscoFrancisco Fausto NITTI

Journaliste dans l’Italie fasciste de Mussolini, il est arrêté en 1926 et interné dans une île au large de la Sicile. plus de 10 ans plus tard, réfugié en France, la République espagnole est en difficulté, il quitte tout pour rejoindre les Brigades internationales. Après la Retirada et les camps sur la plage, il rejoint Toulouse et Silvio Trentin pour résister encore. Il est arrêté et déporté en juillet 1944 dans le sinistre convoi du Train fantôme pour Dachau. Son récit « Chevaux 8, hommes 70 » est un témoignage précis de ce que fut l’enfer de la déportation, et en particulier de ce convoi.

 

 


 

PELISSIER Louis CapitaineLouis PELISSIER dit Carton

Droit et courageux, le capitiane d’infanterie Louis Pélissier sert sa patrie clandestinement en devenant l’organisateur d’une armée de l’ombre: l’Armée Secrète. Présent sur le terrain, déguisé en gendarme ou la pelle à la main pour camoufler des armes, Louis Pélissier a constamment bravé le danger. Il est fusillé par les Allemands, deux jours après le débarquement en Normandie, sur la place d’un petit village du Lot en juin 1944.

 


 

phillipe museeJean PHILLIPE dit Basset

Commissaire de police, Jean Phillipe démissionne en écrivant à sa hiérarchie : «  je refuse … de persécuter des israélites qui , à mon avis, ont droit au bonheur et à la vie, aussi bien que Monsieur Laval lui-même ». Chef régional du réseau Alliance, il est capturé par les Allemands et fusillé le 1er  avril 44, à Fribourg avec 14 membres de son réseau.


Francisco Ponzan Vidal, passeur de 33 ans, arrêté en avril 1943.

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Francisco PONZAN dit Vidal

Républicain espagnol, anarchiste, cet instituteur s’engage dans la résistance française. Il devient un passeur exceptionnel et rejoint le réseau Françoise. Il est arrêté en avril 1943 et exécuté à Buzet sur Tarn quelques jours avant la Libération.


 

 

conchitaConchita RAMOS GRANGE

Âgée de 18 ans, Conchita dont la famille était espagnole, rejoint la Résistance et devient une agent de liaison très efficace pour les maquis d’Ariège. Elle est arrêtée en mai 1944 et transférée à la prison saint-Michel de Toulouse. Elle est déportée avec 800 autres personnes, en majorité des résistants, dans le convoi dit du Train Fantôme. Ce dernier, parti de Toulouse le 3 juillet 1944 est arrivé au camp d’extermination de Dachau le 28 août 1944. Conchita, transférée à Ravensbrück,  est revenue des camps de la mort et a témoigné auprès de très nombreuses générations d’élèves.


 

 

 

Serge Ravanel en septembre 1944. Jean Dieuzaide

Serge RAVANEL

Résistant du mouvement Libération-Sud, il organise la lutte armée aux cotés du couple Aubrac. Il rejoint Toulouse pour y créer les FFI (Forces françaises de l’Intérieur) comme chef régional. Serge Ravanel est l’un des artisans de la Libération de Toulouse  le 19 août 1944.


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Jules Géraud Saliège

« Les juifs sont des hommes, les juives sont des femmes. Les étrangers sont des hommes, les étrangères sont des femmes. Tout n’est pas permis contre ces hommes, contre ces femmes »

La lettre du 23 août 1942 écrite par l’archevêque est l’une des rares manifestations du haut clergé en France sous l’Occupation et eut un retentissement international.


 

 

 

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Georges SEGUY

Jeune apprenti de 15 ans, Georges travaille dans l’imprimerie de la Résistance, celle d’Henri Lion. Il est arrêté en février 1944 avec son patron, et déporté avec l’ensemble du personnel.


 

SOULA Camille 1888-1963Camille SOULA

Camille Soula est une personnalité toulousaine charismatique, pleine d’humour et d’énergie, profondément humaniste, précurseur en bien des domaines, de la recherche pharmaceutique, aux sciences de l’ergonomie, de la poésie ou de la peinture à la résistance. Professeur de physiologie à la faculté de médecine, il organise avec ses collègues de la faculté l’aide aux réfugiés espagnols en 1939. Proche de Silvio Trentin et assidu de sa librairie, il participe à la création du Mouvement de Résistance « Libérer et Fédérer » et à la rédaction de son journal.


 

TAILLANDIERMarcel TAILLANDIER dit Ricardo, Morhange

Marcel Taillandier était le chef d’un réseau de Résistance hors norme : le réseau Morhange.

Infiltrés dans les milieux nazis et fascistes, les résistants réunis autour de Morhange prirent des risques extrêmes pour informer et protéger la Résistance. Marcel Taillandier est un véritable Professionnel de la clandestinité et du contre-espionnage. L’expression « guerre de l’ombre » qualifie pleinement son action face à la Gestapo toulousaine.


 

portrait BM44Silvio TRENTIN

Exilé italien, Silvio Trentin insuffla une forme de Résistance exceptionnelle sur Toulouse.

 


 

francois-verdier-portraitFrançois VERDIER dit Forain

Chef régional de la Résistance, François Verdier a bâti une armature qui a conduit à la Libération. Il fut le premier à être désigné Commissaire de la République

 

 


 

 

Vernant JP 1944Jean-Pierre VERNANT dit Berthier

 Jean-Pierre Vernant fut l’artisan de la Libération de Toulouse aux côtés de Serge Ravanel. Professeur de philosophie le jour, il était dans l’ombre le chef de l’Armée secrète en Haute-Garonne.

 

 


viadieuAchille VIADIEU dit Ginou

 La tourmente des années noires révèle parfois quelques destins exceptionnels. La vie d’Achille Viadieu est, en apparence, celle d’un homme tranquille. C’est en réalité une double vie extrêmement dangereuse que mène celui qui est officiellement un responsable régional de premier rang  d’un parti politique fasciste et ultra- collaborationniste. Achille Viadieu était en réalité “X-2” l’adjoint de Morhange. Intégré au coeur du dispositif nazi et vichyste, ce chef de la collaboration récupérait, au péril de sa vie, des informations capitales pour la Résistance.

Cérémonie 2017 en hommage à François Verdier

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La cérémonie d’hommage au martyr de la Résistance « Forain » François Verdier aura lieu dimanche 29 janvier 2017 à 11 heures devant le mémorial en forêt de Bouconne.

Cette année, les élèves du Collège Jean Jaurès de Colomiers  présenteront leur projet commémoratif.

L’orateur de l’hommage sera Georges MERIC, président du Conseil départemental de la Haute-Garonne.

Venez nombreux partager et défendre les valeurs de liberté, d’unité, de fraternité et de solidarité.

A Léguevin, prendre la RD 42 direction Lassère-Cadours. Le chemin d’accès dans la forêt sera balisé par la gendarmerie.

 

Historique de la cérémonie

François VERDIER « Forain » 1900-1944

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1942 - 1943

Figure emblématique de la Résistance, François Verdier  est celui qui, à l’image de Jean Moulin, a su unir toutes les forces de la Résistance dans la région toulousaine.

 


 

Le début du siècle

Collection Famille Verdier 1904 Lézat sur Lèze

Collection Famille Verdier
1904 Lézat sur Lèze

François Verdier est né dans une famille d’artisans forgerons en Ariège, le 9 septembre 1900. Il grandit à la campagne entouré de cousins.

1912Son père décide de quitter l’Ariège en 1910 et de s’installer à Toulouse. Après plusieurs petits emplois, il ouvre un magasin de machines agricoles, rue Matabiau.

La mobilisation générale est ordonnée en 1914 et Paul Verdier est appelé sur le front.

François est alors au lycée où il prépare un diplôme pour devenir instituteur. Le concours réussi, il s’engage comme volontaire sur le front en 1918.

Portrait de 1919Malgré les traumatismes, la guerre lui permet de découvrir le progrès technique. Il est affecté dans un régiment d’artillerie lourde à voie ferrée.

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Les années folles

 

32 rue Matabiau en 1925

32 rue Matabiau en 1925

Au retour de la guerre, il abandonne ses idées d’enseignement et rejoint son père dans son magasin de machines agricoles. Il apprend le métier. Le monde rural n’est pas pour lui  une découverte. François Verdier est un homme de la terre, qui aime le contact avec les paysans, qui connaît leurs difficultés. Souvent, il échange en occitan.1925 (2)

Coté vie privée, il épouse une jeune femme rencontrée au cours des ses virées dans le Gers, département qu’il affectionne. Il va jouer au rugby à l’Isle-Jourdain avec ses copains. En 1922 il a un garçon, Jacques, mais divorce en 1925.

Les années Trente

 

Avril 1932, Saint-Orens

Avril 1932, Saint-Orens

En 1932, il se marie avec Jeanne Lafforgue, institutrice dans le Gers.

Parisienne d’origine, c’est une femme cultivée et  indépendante,. Elle possède un domaine dans le Gers, La Salle, qui devient rapidement le lieu incontournable des fins de semaine avec les amis.

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Saint-Orens, 1936. Françoise « Mounette » est née en 1934, ici avec Jeanne et les filles du régisseur.

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 Société F. Verdier et Cie.

A la fin des années 1930, François Verdier est un notable de Toulouse. Il a développé son entreprise de machines agricoles en quelques années, sillonnant tous les marchés de la région.AnnuaireToulouse_1942-1 trv

1938, sur les foires et les marchés, il étend son réseau de relations à l'ensemble de la région

1938, sur les foires et les marchés, il étend son réseau de relations à l’ensemble de la région

François Verdier a donné de l’envergure à son entreprise, il devient rapidement l’un des plus gros négociants de la région. En 1934, il installe son entreprise chemin du raisin à Toulouse. Il sait utiliser tous les moyens techniques modernes.

Il devient un adepte du téléphone et en fait installer partout. Il sait le temps que cela lui fait gagner. De même pour les voitures, c’est un passionné d’automobiles. Il s’équipe très vite d’une petite voiture puissante et rapide pour circuler sur les routes de la région. Il se fait fier d’être d’une fiabilité et d’un sérieux hors norme pour ses clients, garantit les délais les plus courts. En août 1938, un incendie détruit son entreprise et il perd la quasi totalité des entrepôts et du matériel. Il contacte la presse et fait savoir que toutes les commandes seront malgré tout honorées dans les délais.

Les commerciaux de l'entreprise F. Verdier et Cie

Les commerciaux de l’entreprise F. Verdier et Cie

 Juge au tribunal de commerce

1938 Tribunal de commerce, François Verdier est en haut

1938 Tribunal de commerce, François Verdier est en haut

François Verdier a accepté la reconnaissance de ses pairs et devient juge aux tribunal de commerce de Toulouse. Verdier est connu comme un juge enthousiaste, consciencieux, toujours juste, même si parfois on le reconnaît un peu trop tolérant.

Toulouse est touchée dès 1936 par les événements qui se déroulent si près d’elle en Espagne. La ville est secouée par des rumeurs d’attentats « commis par les Rouges ».

François Verdier commerce avec l’Espagne et il est rapidement sensibilisé aux secousses violentes que connaît la République espagnole.

D’autre part, en 1938, secrétaire fédéral de la Ligue des droits de l’homme, il participe aux réunions de soutien aux Républicains espagnols, organise la collecte et l’envoi de matériels en Espagne.

François Verdier connaît le sens de l’engagement et cherche immédiatement à agir.

 

Les années noires

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Affiche Révolution Nationale les fondations, Mémorial de Caen

Été 1940: Toulouse constate l’arrivée des milliers de réfugiés internés dans des camps, la mise en place du gouvernement de Vichy avec à la tête le vieux Maréchal décidé à appliquer sa politique de «révolution nationale».

Lois raciales, antisémites, internements administratifs et suppression des libertés individuelles : la « révolution nationale » doit remettre de l’ordre.

François Verdier est directement touché par les premières lois sectaires du régime de Vichy. Fiché, il se voit confisquer son siège au Tribunal de commerce en raison de son appartenance à la franc-maçonnerie en 1941. François Verdier s’était engagé au Grand Orient de France en 1934 (Les Cœurs réunis).

Débuts du combat clandestin

Il entre dans ce combat débutant avec les amis qui partagent ses idées, notamment avec les habitués de la librairie de Silvio Trentin. On ignore quels furent précisément ses premiers contacts.

Les premières actions se font au sein d’un petit groupe appelé Vérité, groupe de moins de dix personnes. Ce groupe rejoint ensuite un moyau un peu plus grand, dirigé par le colonel Georges Bonneau, Liberté, Égalité, Fraternité, base du futur mouvement Libération-sud à Toulouse.

En novembre 1941, photo prise lors d'un voyage à Madrid.

En novembre 1941, photo prise lors d’un voyage à Madrid.

Les mois passent, l’action se précise, les contacts se multiplient et François Verdier rejoint un plus grand mouvement de Résistance, Libération-Sud, créé à l’automne 1942.

Les qualités d’organisation, de communication et d’écoute de François Verdier, son courage et son sang-froid le poussent rapidement à assumer d’importantes responsabilités au sein du mouvement.

Son réseau de connaissances lui permet de recruter pour la Résistance. Son sens de l’organisation, ses convictions et sa respectabilité lui confèrent une aura au sein du mouvement. François Verdier est ouvert, fin négociateur, intelligent et vif d’esprit, il sait entreprendre et concrétiser une action.

Ancien combattant de la Grande Guerre, il sait qu’il faut organiser des actions militaires, que les journaux, les tracts ne suffisent pas. Fin 1942, il se rapproche de Marcel Taillandier dit Ricardo puis Morhange.

Depuis plusieurs mois, Marcel Taillandier a constitué un groupe de militaires qui organisent la cache d’armes et de matériels. Marcel Taillandier est d’une efficacité redoutable, il peut agir vite et de façon contrôlée. Il a mis sur pied des groupes d’actions et a de nombreux contacts dans la police et la gendarmerie.

François Verdier a lui aussi des contacts sûrs parmi les services judiciaires, en particulier avec le commissaire Gamel et le commissaire Babit. Il va d’ailleurs plusieurs fois utiliser ses relations pour intervenir en faveur d’un résistant. C’est par ce biais qu’en février 1943, François Verdier parvient à faire libérer sa secrétaire clandestine, Olga Sfedj du camp de Brens dans le Tarn.

Olga Sfedj est arrêtée alors qu'elle est en train de coller des tracts le 10 novembre 1942. Juive, elle est aussitôt envoyée au camp de femmes à Brens près de Gaillac.

Olga Sfedj est arrêtée alors qu’elle est en train de coller des tracts le 10 novembre 1942. Juive, elle est aussitôt envoyée au camp de femmes à Brens près de Gaillac. coll. ADHG

 

L’occupation allemande

 

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Après l’invasion de la zone sud par les troupes allemandes (novembre 1942), l’urgence est à l’organisation et l’unification pour la Résistance.

Pour les résistants, cette arrivée coïncide avec une découverte de la dangerosité de la clandestinité face à des ennemis redoutables. Les premières arrestations commencent, les résistants font l’épreuve de la torture. La prison saint Michel est réquisitionnée pour partie par les Allemands qui ne tardent pas à remplir les cellules.

Les règles de sécurité se multiplient. La guerre est à Toulouse. En janvier 1943, la Milice est crée et ses forces viennent suppléer celles de la police allemande dans la lutte contre les résistants, les « terroristes ».

Au niveau national, Jean Moulin prépare la création des Mouvements Unis de Résistance, qu’il faut concrétiser sur le terrain. La tâche n’est pas simple dans la région, les groupes de Résistance sont éparpillés, discrets pour les besoins de sécurité et aux composantes politiques, humaines et religieuses très variées.

Au moment de la création des MUR dans la région, au printemps 1943, François Verdier est désigné comme adjoint au chef régional du Noyautage des Administrations Publiques, le docteur Maurice Dide.

 

« Forain », chef régional de la Résistance

Après un premier échec d’unification des forces de la Résistance en R4 (la région militaire composée de 9 départements), il fallait un homme admis et respecté de tous pour conduire vers l’unité des personnalités et des groupes si différents.

François Verdier sera l’homme de la situation.

En juin 1943, François Verdier, qui travaille au développement du Noyautage des Administrations Publiques avec le docteur Maurice Dide, est choisi par le général de Gaulle pour devenir le chef des Mouvements Unis de Résistance en Midi-Pyrénées et désigné Commissaire de la République. Il devient « Forain » tout en continuant d’être Verdier, entrepreneur.

La tâche est colossale, tout est à faire.

Forain couv Doux Pays

François Verdier s’est inspiré du dessinateur Jean-Louis FORAIN pour trouver un pseudonyme à l’été 1943.

François Verdier rencontre régulièrement Raymond Naves, chef de la résistance socialiste. Les deux hommes s’entendent tout de suite très bien, leur approche de la Résistance est la même, leur façon de négocier également.

François Verdier doit organiser et coordonner, dans la plus grande discrétion, les actions : réception de parachutages, préparation de sabotages, récupération de matériel, le renseignement, le recrutement, les passages, la gestion quotidienne des résistants passés dans la clandestinité… tout en maintenant un semblant de vie «normale » pour ne pas éveiller les soupçons de la police française.

Forain doit surtout préparer la libération du territoire et choisir des personnalités de confiance qui seront aptes à rétablir la République. Son métier lui permet de se déplacer aisément pour rencontrer les responsables de la résistance régionale. Forain sait aussi faire preuve d’autorité, sachant se faire respecter des résistants indépendants ou ayant d’autres conceptions que lui de la Résistance.

Il doit également faire face à des attaques internes aux MUR de la Région qui l’atteignent personnellement, qui frôlent la diffamation et traduisent une véritable volonté de nuire voire de détruire…

Mais pour François Verdier la Résistance est une tâche suprême qui ne doit souffrir aucune faiblesse.

 

Décembre 1943, « l’opération de minuit »

Depuis quelques semaines, la police allemande, la Gestapo, prépare dans le plus grand secret une vaste opération contre la Résistance régionale.

François Verdier semble avoir été repéré dès novembre 1943 avec certitude par une équipe de la Gestapo, avec la complicité d’agents français. Il semble qu’un officier des MUR se soit laissé abuser par un agent allemand et qu’il ait livré les noms des responsables des MUR.

François Verdier est arrêté dans la nuit du 13 au 14 décembre 1943, au moment où dans toute la région, les Allemands surprennent à leur domicile plus d’une centaine de personnes (dont 26 à Toulouse).

La villa Francillon, 34 rue du docteur Jean Arlaud

La villa Francillon, 34 rue du docteur Jean Arlaud

François Verdier ne se cachait pas, sa notoriété l’en aurait empêché. Le soir du 13 décembre 1943, il est chez lui, dans son bureau avec Jeanne, sa fille Françoise dort à l’étage.

 

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Plaque apposée à l’entrée de la maison qui fut celle de François Verdier.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette opération, soigneusement préparée par la Gestapo avait pour nom de code « l’opération de minuit ».

François Verdier connaissait les risques qu’il encourait, il se savait en danger, il avait été prévenu, appelé à Alger mais avait refusé de partir devant l’ampleur du travail encore à réaliser. Cependant un déplacement était prévu le 15 décembre à Paris. Il avait son billet de train dans sa poche. Agenda FV 1943 - resa 1ere classe sncf

Jusqu’au bout son courage a été exceptionnel.

Enfermé à la prison Saint Michel pendant un mois et demi, il est interrogé avec acharnement, torturé par des officiers nazis déterminés, parce qu’ils savent qui est entre leurs mains.

En savoir plus : L’opération de Minuit

 

Un homme au courage exceptionnel

Mais Forain ne parle pas, il ne délivre aucun de ses secrets à la Gestapo, endure toutes les tortures et les pires sévices  (des témoins l’ont aperçu durant ses transferts entre la prison Saint-Michel et le siège de la police allemande dans un état physique épouvantable). Il ne cède à aucune pression, même face aux menaces exercées sur sa famille (sa femme Jeanne a été arrêtée et déportée, sa fille est recherchée par la police allemande) pour préserver l’organisation de la Résistance qu’il a patiemment et minutieusement mise en place.

Collection Archives municipales de Toulouse

Son seul soutien est un petit journal de prison dans lequel il écrit régulièrement. Ces lettres ont été  données à sa famille après sa mort.

Face à l’absence de révélations, à l’inefficacité des interrogatoires et malgré son statut de chef de la Résistance régionale avéré, la Gestapo ne l’envoie pas en Allemagne, ni même à Paris mais le conduit discrètement en forêt de Bouconne le 27 janvier 1944.

Forêt de Bouconne

Forêt de Bouconne

Le long d’un chemin isolé, ses bourreaux l’exécutent d’une balle dans l’abdomen. Peut-être pour effacer toutes traces de leur barbarie ou au contraire pour accentuer le degré d’horreur, les deux policiers de la Gestapo font exploser la tête du chef de la Résistance avec une grenade.

Le corps de François Verdier fut immédiatement retrouvé par un garde forestier qui avait entendu les détonations. Le corps de Verdier fut rapidement  identifié.

Aucune arrestation ne suivit la mort de Forain, ce qui permit  à son organisation de tenir jusqu’à la libération, sept mois plus tard.

Liberte soir 6 fevrier 1945

 

Mémoire

 

Entrée du collège François Verdier de Lézat-sur-Léze (Ariège)

Entrée du collège François Verdier de Lézat-sur-Léze (Ariège)

Deux collèges portent son nom, l’un à Lézat-sur-Lèze,  son village natal, le second à Léguevin, commune à proximité de l’endroit où il a été assassiné.

Station de métro François Verdier. Oeuvre de photo A. Mila

Station de métro François Verdier à Toulouse. Oeuvre de P. Corillon
photo A. Mila

A Toulouse, le nom de François Verdier a été attribué à l’une des belles allées de la ville ainsi qu’à une station de métro.

Une cérémonie est organisée chaque dimanche qui suit le 27 janvier en forêt de Bouconne autour du Mémorial construit à l’endroit où fut retrouvé son corps en 1944.

Mémorial Foret de Bouconne

 

Devant sa maison natale à Lézat sur Lèze

Sa fille Françoise dans le reflet de la vitrine de la maison natale à Lézat-sur-Lèze

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En savoir plus:

La cérémonie en forêt de Bouconne

Discours prononcés en hommage à François Verdier

L’opération de Minuit, 13-14 décembre 1943

Le journal carcéral de François Verdier

Bibliographie indicative sur la Résistance

 

 

 

Images: Fonds privé Famille Verdier

Texte: Elérika Leroy

Prix d’histoire Gratien Leblanc 2016 – Académie du Languedoc

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L’Académie du Languedoc a attribué le prix d’histoire Gratien Leblanc 2016 au livre « François Verdier, l’honnête homme, le résistant, l’unificateur ».

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C’est Lucien Vieillard, jeune résistant au sein du mouvement Libération-Sud pendant les Années noires, actuel Président de l’ANACR (Association Nationale des Anciens Combattants de la Résistance et Amis) qui a remis ce prix à l’auteur, Elérika Leroy.

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Voir la cérémonie de remise du prix d’histoire par l’Académie du Languedoc : Extrait de la cérémonie du jeudi 26 mai 2016 au Conseil départemental de la Haute-Garonne.

Merci à Patrick Jubert (DASL) pour ces images.

 

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Extrait de l’Avant-propos du livre


« L’historien n’a rien d’un homme libre. Du passé, il sait seulement ce que ce passé même veut bien lui confier.»

Marc Bloch

Bien rares sont ceux à savoir le grand homme qu’était François Verdier parmi les Toulousains qui arpentent à l’ombre des platanes centenaires les allées ou patientent sur le quai de la station de métro qui portent son nom. Insouciants, ou préoccupés par leur quotidien, ils ignorent que sous ce nom se cache un homme viscéralement libre, généreux et humaniste. Pétri de valeurs inébranlables qui l’ont porté durant sa courte vie vers un destin extraordinaire. Car là n’était pas toute la richesse de cet homme qui, doté de qualités rares comme le sens inné de l’organisation, eut la capacité d’unir une Résistance dispersée, faisant tout autant abstraction de divergences politiques que des rivalités internes. L’homme ne s’est jamais détourné de son but, ne regardait ni à droite ni à gauche pour savoir ce que l’on pensait de lui ou de son action, il gardait son cap, avançait sans sourciller, s’abstenant d’atermoiements inutiles. Son bon sens et sa vivacité d’esprit permirent en moins de cinq mois de bâtir les fondations clandestines d’une société démocratique et républicaine. Les choix de François Verdier étaient toujours justes. Il ne s’est pas trompé. L’armature lui a survécu jusqu’à la Libération, tant attendue.

Son combat à lui a pris fin un matin de janvier, il y a plus de soixante-dix ans, mais son souvenir a perduré autour d’un mémorial et d’une cérémonie créés par ses amis juste après la Libération. « Cérémonie en vérité unique en France, parce qu’elle combine l’individu et la collectivité qu’il entendait défendre et incarner. Même Jean Moulin n’a pas droit à un hommage de ce modèle[1]. »

Quelle n’est pas la surprise de celui qui découvre, par un dimanche matin d’hiver n’épargnant ni le froid ni bien souvent la pluie, en plein cœur de la forêt de Bouconne, cette cérémonie commémorative à nulle autre pareille.

Au premier regard, le spectateur qui assiste pour la première fois à ce rassemblement en forêt est inévitablement frappé par la singularité de ce qu’il découvre. Mais il convient auparavant d’approcher le site invariablement envahi à cette date sans se laisser effrayer par la quantité de véhicules, obligeant le retardataire à parcourir quelques kilomètres supplémentaires pour gagner le lieu du rendez-vous. Ce premier obstacle passé, après avoir remonté ce long chemin, une clairière apparaît et l’on mesure la validité de l’impression initiale : ce n’est pas moins qu’une véritable foule qui est réunie en ce lieu.

Lorsque j’y suis venue pour la première fois, intriguée par cette cérémonie organisée au cœur de la forêt, j’ai ressenti beaucoup d’émotion, impressionnée par ce rassemblement républicain et par le lieu. Dix-sept années après ma première expérience de cette commémoration, grand est mon plaisir de constater l’indéniable constance, tant dans la mobilisation qu’elle suscite que dans la qualité des hommages rendus. Lorsqu’il me fut proposé de me soumettre à mon tour à cet exercice en 2013, je ne me figurais pas me retrouver aujourd’hui prête à vous livrer le fruit de mes recherches sur François Verdier.

En 1995, à l’université Toulouse-Le Mirail[2], Jean-Pierre Vernant a accepté d’ouvrir un colloque sur la mémoire et l’histoire de la Résistance. À ce moment-là, les acteurs témoins, encore assez nombreux, sont confrontés aux historiens de la Résistance. Leur témoignage, interrogé, malmené, confronté aux documents, est remis en question par les scientifiques.

« Un document, une lettre, posent des problèmes analogues. Je pense à des thèses que j’ai lues et où, je crois, les documents ne pouvaient être réellement compris que par ceux qui avaient vécu cela. Je m’explique. L’historien doit prendre de la distance, il doit faire comme si ce qu’il étudiait n’avait aucun rapport avec lui. Moi j’étudie l’Antiquité. Je suis tranquille de ce côté-là : personne ne va me dire… Mais il en va autrement pour quelqu’un qui étudie ce à quoi il a participé, comme vous, monsieur Cordier. Vous êtes obligé de prendre de la distance – mais vous ne pouvez pas échapper au problème – pour savoir comment les agents ont vécu au présent les événements qui, pour vous, représentent simplement du passé. Comment les voyaient-ils, eux ? Quel était leur horizon d’attente ? Quelles étaient leurs espérances ? Qu’est-ce que voulait dire leur action ? Et cela, je crois que les témoins peuvent vous le restituer. Et je crois que les témoins, certains témoins, pas seulement Serge Ravanel, d’autres me l’ont dit parmi les copains que j’ai retrouvés ici, m’ont dit : « Mais qu’est-ce qu’il raconte ? On ne s’y retrouve pas, nous, là-dedans. » Marc Bloch disait que l’historien est un type qui est toujours à l’affût de la « chair humaine ». C’est-à-dire que, derrière l’étude du passé, ce qu’il veut savoir c’est qui étaient ces gens qui étaient là, comment ils ont fait ça. »

« Chair humaine », oui. C’est dans cette exacte perspective que j’ai délibérément pris le parti d’orienter mes recherches. Loin des grands concepts, des grandes idées, de la prétentieuse ambition de reconstituer l’histoire de la Résistance dans la région.

C’est pourquoi dans ce livre j’ai voulu retrouver François Verdier avant de percevoir « Forain ». Reconstituer les étapes de sa vie, de ses origines paysannes au grand bourgeois toulousain qu’il était devenu. Tenter ainsi de comprendre pourquoi cet homme a sacrifié sa vie, en pleine conscience, en homme libre. Car, à la fin de mes recherches, c’est une certitude, François Verdier savait qu’il allait être arrêté, un jour ou l’autre. Ce n’était en aucune manière de l’imprudence, de l’arrogance ou de la négligence. Il savait pertinemment qu’en devenant le chef de la Résistance il acceptait de mourir. Et à regarder sa courte vie, de loin, plus de sept décennies après, on comprend son attachement profond à une valeur désuète aujourd’hui, le patriotisme. François Verdier s’est sacrifié, il n’y a pas d’autres mots. Il a accepté ce risque au nom de ses valeurs suprêmes. Mais, pour reprendre les propos de Marc Bloch :

« Un nom d’homme ou de lieu, si l’on ne met derrière lui des réalités humaines, est tout bonnement un vain son […]. Être “précis”, c’est se tenir proche du concret ; ce n’est pas étiqueter à tour de bras des tiroirs vides[4]. »

Ainsi, il n’est donc pas question pour moi d’ouvrir des tiroirs pour tenter d’y caser François Verdier, cela n’aurait aucun sens. Il ne s’agit pas non plus pour moi d’écrire une hagiographie de « Forain », bien que je concède volontiers éprouver à son égard une admiration et un respect sans réserve. Là n’était pas le propos.

Conduit par ses valeurs, profondément justes et humanistes, François Verdier a agi. Par solidarité, par générosité, tout d’abord. Et, parce qu’il n’a jamais oublié d’où il venait, il a su convaincre, trouver les mots, trouver l’énergie et le courage pour agir.

Au gré de mes recherches, j’ai pu en trouver les preuves, c’est-à-dire des éléments concrets. Parfois ce ne sont que des indices, sans élément précis et circonstancié. La période clandestine, de par sa nature même, n’a pas laissé de traces. Les mémoires de certains résistants et les travaux d’historiens permettent de trouver quelques éléments qui, confrontés aux archives et aux quelques témoignages, éclairent la personnalité et l’histoire de François Verdier.

Reconstituer un puzzle. Croiser les sources, à partir de rares témoignages, à partir d’archives, à partir de travaux historiques, des petits riens sur François Verdier. Il est tout de même surprenant, voire même déstabilisant, s’agissant de François Verdier, de constater que l’absence de travaux rigoureux sur son compte est toujours à déplorer soixante-dix ans après sa mort, sans que je puisse m’en expliquer la raison.

Alors, revenir à la « chair humaine », avec ses défauts et ses qualités, pour tenter de comprendre ou du moins d’approcher la réalité sur le chef qu’il était, sur son action, sur son organisation, ses difficultés, ses réussites. Avec humilité, toujours. En ayant la pleine conscience qu’il ne sera jamais possible de tout connaître, de tout expliquer. Comme en témoignait Louis-Marie Raymondis :

 

« Malgré tout ce qu’on écrira sur François Verdier, on ne saura jamais l’ampleur de son travail, parce qu’il a été prudent. Ce n’est pas quelqu’un qui a fait perdre ses camarades par imprudence, c’était quelqu’un qui savait ce qu’il faisait, qui le faisait bien, comme il vendait bien ses machines agricoles… Excusez-moi pour ce rapprochement qui est insultant presque, mais c’est la vérité. François Verdier n’a jamais cessé d’être ce qu’il était, c’est-à-dire un homme droit, honnête, avisé. Il a mené une grande aventure mais n’était pas un aventurier[5]. »

 

Elérika Leroy, extrait  de François Verdier, l’honnête homme, le résistant, l’unificateur, Éditions Privat, 2014.

 

[1]. Pierre Vidal-Naquet, « Sur une commémoration », revue interdisciplinaire Genre Humain, Paris, Seuil, 1988.
[2]. Aujourd’hui université Jean-Jaurès.
[3]. Jean-Pierre Vernant, Mémoire et Histoire : la Résistance, Actes du colloque, Toulouse, Privat, 1995.
[4]. Cité par Laurent Douzou, La Désobéissance. Histoire du mouvement Libération-Sud, Paris, Odile Jacob, 1995 (p. 20, extrait d’un article paru en 1940 dans les Annales d’histoire sociale).
[5]. Témoignage recueilli à Nice en 2010.